Dans un arrêt à publier au Recueil, le Conseil d’État réitère sa jurisprudence en matière de biens de retour. Quoi, qui, quand, comment, sous quelles limites ? Et surtout, à l’heure de l’Internet et de la dématérialisation, peut-il exister des « biens de retour incorporels » ?!
Qu’est-ce qu’un bien de retour ?
Lorsqu’un service public est confié par le biais d’un contrat de concession (aussi appelé délégation de service public pour les collectivités territoriales), un régime particulier s’applique aux biens. Ce régime, jurisprudentiel à l’origine, dispose d’une assise légale depuis l’entrée en vigueur du code de la commande publique !
La jurisprudence a distingué trois régimes.
Les biens de retour…
…sont les biens nécessaires au fonctionnement du service public et en tant que tel indissociablement liés audit service. Ils se caractérisent par un droit de retour gratuit à la personne publique concédante-délégante.
Contrairement à une idée répandue, ce ne sont pas seulement ceux acquis ou réalisés pendant l’exécution : un bien apporté par le concessionnaire-délégataire peut très bien se voir qualifié de « bien de retour » et être frappé d’expropriation ![1]
Et il faut garder en vue une dissymétrie importante :
Les biens de reprise…
… sont seulement utiles, sans être indispensables, au fonctionnement du service. Ils se caractérisent par une faculté de retour au concédant.
Cette faculté se traduit par une clause de reprise que seule l’autorité concédante peut activer. Par conséquent, celle-ci peut forcer son titulaire à vendre, mais le titulaire ne peut pas la forcer à acheter !
Les biens propres…
…ne sont ni nécessaires ni utiles au service public, c’est pourquoi ils se caractérisent par une propriété exclusive du concessionnaire. Généralement, ces biens ont été acquis ou construits pour l’exercice d’activités indépendantes du service délégué mais s’y sont retrouvés affectés par commodité.
Le retour des biens de retour est-il vraiment « gratuit » ?
Le retour est dit gratuit parce qu’il s’effectue, en principe, sans compensation financière… mais seulement si le bien a été amorti ! C’est pourquoi le Conseil d’État a posé des règles d’indemnisation des biens de retour non amortis (voir notre article).
De manière évidente, le juge peut toujours dire si un bien est « nécessaire » ou non au service public et donc s’il s’agit d’un bien de retour.
Mais les parties peuvent-elles s’accorder sur cette qualification ? Autrement dit, le contrat ou un état des lieux d’entrée peuvent-il imposer au juge une sorte d’inventaire ?
Réponse de Normand [2] :