Lorsque la date et l’heure limite de réception des offres (DLRO) approche, l’indisponibilité de la plateforme de dématérialisation peut être source de difficultés tant pour les entreprises que pour les acheteurs.
Dans une démarche de sensibilisation des entreprises, la Direction des Affaires Juridiques (DAJ) de Bercy indique, dans le « Guide ‘très pratique’ de la dématérialisation des marchés publics » à destination des opérateurs économiques – Edition Mai 2020 – qu’il incombe aux entreprises d’anticiper le dépôt de leur dossier de sorte à prévenir la survenance d’éventuels problèmes techniques avant l’échéance[1].
En parallèle, la jurisprudence considère qu’il appartient à l’entreprise de faire preuve de diligence lors du dépôt de son offre.
A cet effet, le tribunal administratif de Dijon, par une ordonnance en date du 23 février 2021 (n°2100373), a dit pour droit que la responsabilité de l’acheteur peut être écartée du fait de l’indisponibilité de la plateforme de dématérialisation dès lors que l’entreprise doit prévoir « un laps de temps minimum de sécurité » permettant de garantir l’envoi dématérialisé du pli en « lui laissant les moyens de remédier à un éventuel problème technique » qui pourrait survenir (voir également en ce sens : TA Toulouse, ord. 16 juin 2017, n°1702445). Le juge rejette donc la requête du candidat, connecté 20 minutes seulement avant l’heure limite, dans la mesure où « la tardiveté du dépôt de son offre est imputable à la société ».
La position des juges du fond a été confirmée par le Conseil d’Etat qui considère que l’entreprise doit accomplir, en temps utiles, les diligences normales attendues d’un candidat pour le téléchargement de son offre (CE, 23 septembre 2021 n°449250).
Ainsi, en l’état actuel du droit, lorsqu’une entreprise a manqué à son devoir de diligence et qu’elle se heurte à des problèmes techniques, l’empêchant de déposer son dossier avant l’échéance, l’acheteur peut être fondé juridiquement à poursuivre la procédure de passation. A contrario, si l’entreprise a accompli l’ensemble des diligences attendues, l’acheteur ne pourra pas écarter son pli.
Malgré la survenance de problèmes techniques peu avant l’échéance de la consultation, plusieurs solutions demeurent mobilisables afin que l’entreprise puisse déposer son pli.
Tour d’horizon des solutions envisageables, selon que l’acheteur ait pris connaissance de l’indisponibilité de la plateforme avant ou après la DLRO…
→ Les mesures envisageables avant l’expiration de la DLRO
L’acheteur dispose de la faculté de prolonger le délai de réception des offres, conformément à l’article R.2151-4 du code de la commande publique.
Le juge administratif admet que, sous réserve du respect du principe d’égalité de traitement entre les candidats, l’acheteur procède à une prorogation du délai de remise des offres lorsqu’elle est nécessaire pour couvrir le temps de rétablissement de la plateforme de dématérialisation et permettre aux entreprises de répondre à la consultation (CAA Nantes, 28 décembre 2017, n°16NT01413).
Par conséquent, l’acheteur peut procéder à une prorogation du délai de remise des offres afin de pallier la survenance de problèmes techniques rencontrés sur la plateforme de dématérialisation.
Lorsque le mode de transmission du pli contrevient à l’obligation de dématérialisation fixée par les articles L.2132-2 et R.2132-1 et suivants du code de la commande publique ou qu’il ne respecte pas les exigences fixées par le règlement de la consultation, le dépôt de l’entreprise est irrégulier (CE, 22 mai 2019, Sté Corsica Ferries, req. n°426763).
Sur le fondement de l’article R.2144-2 du code de la commande publique, l’acheteur peut régulariser une candidature irrégulière y compris si l’irrégularité tient au non-respect de l’obligation de dématérialisation.
Dès lors, en cas de dysfonctionnement de la plateforme, l’entreprise pourrait transmettre son pli par courrier électronique ou en mains-propres, contre récépissé, le dépôt pouvant par suite être régularisé.
→ Les mesures envisageables après l’expiration de la DLRO
Par précaution, l’entreprise peut remettre à l’acheteur une copie de sauvegarde avant la date et l’heure limite de réception des offres, conformément à l’article R.2132-11 du code de la commande publique.