Et si demain nous réservions 50% d’achats publics aux entreprises françaises ou ressortissantes de l’Union européenne dans l’objectif de construire et de défendre une véritable souveraineté numérique ?
C’est à cette question un tantinet délicate – tant politiquement que juridiquement – posée par M. le Député C. Naegelen que le Gouvernement a été amené à répondre le 10 mai dernier.
L’on enfoncera certainement une porte ouverte en rappelant que le droit de la commande publique est réfractaire (doux euphémisme…) à l’instauration d’une quelconque préférence géographique, qu’elle soit locale, nationale ou communautaire (Voir notre article à ce sujet).
Mais ce postulat ne devrait-il pas céder face aux enjeux que pose la question contemporaine (et brûlante) de la souveraineté numérique ?
D’aucuns considèrent que la mise en place d’une stratégie du « localisme » numérique permettrait de soutenir l’émergence de « champions européens du numérique » et réduirait la dépendance numérique de la France à l’heure où les grandes puissances ont d’ores et déjà mis en place des politiques industrielles volontaristes pour défendre leur filière numérique, via notamment des politiques d’achats publics réservés ou de préférence.
Si le Gouvernement « partage évidemment la nécessité de favoriser la relocalisation des achats stratégiques », il rappelle que la mise en œuvre d’une stratégie de relocalisation doit se faire dans le respect des traités internationaux (accord sur les marchés publics conclu dans le cadre de l’OMC, notamment) et du droit européen [ndlr: droit de l’Union européenne] qui interdisent la discrimination des candidats en raison de leur nationalité.
Alors comment renforcer la part française des achats de l’Etat ?
Bien que la préférence géographique soit une nouvelle fois mise au ban par le Gouvernement, la Réponse ministérielle rappelle que les acheteurs peuvent mobiliser différents leviers afin de « favoriser » la part des entreprises françaises voire européennes.
Les acheteurs sont en effet invités à :
Et comment protéger les données de l’administration et soutenir les industriels du « Cloud computing » ?
Si localisme il n’y a pas, quelles sont les mesures envisagées visant à protéger les données des administrations et à soutenir les industriels du « cloud computing » ?
La Réponse ministérielle se veut rassurante en rappelant que la protection des données des administrations et le soutien aux industriels du « cloud computing » sont au cœur de la stratégie nationale sur le cloud dévoilée par le Gouvernement le 17 mai 2021.
Cette stratégie se fonde sur les trois piliers suivants :
L’on retiendra que le Gouvernement ferme (une fois de plus) la porte à la préférence géographique mais que les acheteurs peuvent favoriser, de manière incidente, les entreprises « locales » (françaises et communautaires) en prévoyant des conditions de participation ou d’exécution spécifiques.
Mais ces mesures suffiront-elles pour bâtir et préserver la souveraineté numérique de demain ? L’avenir le dira…
Réponse du Ministère de l’économie, des finances et de la relance publiée au JO le : 10/05/2022 page : 3137